04-10-2008, 10:44 AM
Chapitre 2: Haine
Ils arrivèrent au laboratoire cavernicole. Celui-ci n'avait pas changé depuis leur dernier réveil. L'entrée était fermée par une énorme porte en titane massif. De nombreux fils électriques, câbles et machines longeaient les murs laissés à l'état de roche brute. Plusieurs plans et petits appareils s'éparpillaient sur les quelques bureaux. Au centre était disposée la table d'opération sur laquelle les deux jeunes avaient été cybernétisés. Leurs deux sarcophages métalliques munis chacun d'un hublot et numérotés dix-sept et dix-huit, adossés sur un mur, reposaient à la verticale sur des socles, des gros tuyaux en sortant depuis leur sommet. Les lieux étaient incroyablement bien rangés et éclairés pour un laboratoire aménagé dans une grotte par un savant fou. N°18 demanda au scientifique pourquoi il n'avait pas voulu qu'ils tuent ses ennemis.
« Ce n'était pas encore le bon moment.
- Pourtant, nous sommes bien plus forts qu'eux et nous aurions pu les éliminer facilement. Et nous n'avons pas de défauts. Nous sommes les créatures parfaites, comme vous le souhaitiez...
- La ferme, tas de ferraille ! Vous n'avez pas à contester mes ordres ! Vous m'appartenez et me devez obéissance ! Un point c'est tout ! Vous n'êtes que des outils pour ma vengeance ! Mon arme parfaite viendra plus tard ! »
Les jumeaux continrent leur rage et se contentèrent d'acquiescer. Des outils ? Ils n'étaient que de vulgaires outils ? S'ils avaient pu le tuer en cet instant, cela n'aurait pas tardé. Il les avait humiliés, torturés, leur avait enlevé tout ce qui leur était cher pour les transformer en instruments de sa vengeance. Ils devaient garder sa confiance et obtenir des informations auprès de lui, s'ils voulaient s'échapper. Ils ne souhaitaient pas tuer ces gens. Ils ne les connaissaient pas et se fichaient d'eux. N°18 n'avait posé sa question que pour comprendre les agissements du vieillard. Ils devaient tenir.
Gero, alla vers son ordinateur pour analyser les dernières données recueillies. Il appris donc d'où venait ce Cold. Gokû et les autres avaient ainsi affronté un homme nommé Freeza sur Namekk. Il ne savait pas très bien pourquoi Son et les siens l'avaient rencontré là-bas, mais apparemment, il était sensé être le numéro un de l'univers en terme de puissance. Il sourit à ce titre, car ses cyborgs étaient bien plus forts que lui. Gokû l'avait vaincu en devenant le Super Saiyan. Gero ne put pas en savoir plus sur ce Super Saiyan de légende, mais en tout cas, c'était une transformation qui conférait une énorme puissance.
Freeza était alors revenu sur Terre pour se venger de sa défaite et il était accompagné de son père, Cold. Étrangement, à son arrivée sur Terre, celui-ci n'était pas le même que lors du combat. Il était beaucoup plus grand et avait un aspect plus bestial, que ses grandes cornes grises accentuaient. Sa peau mauve était munie de carapaces blanches et roses sur la tête, les avant-bras, les tibias et le bout de sa queue. Une cape violette recouvrait une armure recouvrant son buste. Quant à son fils, il ressemblait à son père lorsque celui-ci avait affronté Son, si ce n'était qu'il était en grande partie mécanisé, sans doute était-ce dû aux blessures infligées par le Super Saiyan sur Namekk.
Ils allaient commencer à s'attaquer à la Terre, mais Gokû s'était alors téléporté devant eux avec une technique étrange. Il avait rapidement mis l'ancien numéro un à terre, tandis que ses amis avaient tué les hommes de main. Mais Son, lui, n'avait pas achevé son adversaire et avait même laissé à l'autre ennemi le choix de partir, s'ils ne voulaient pas mourir. Gero grogna à cette scène. Épargner ce maudit extraterrestre alors qu'il avait froidement assassiné le Commandant-en-Chef Red, quatorze ans plus tôt. Le savant enrageait. Cependant Cold avait lui-même achevé son fils en disant que celui-ci ne lui était plus utile. Apparemment, il s'était servi de lui pour ne pas avoir à faire "le sale travail". Il semblait ne pas aimer l'effort. Il avait ensuite proposé à Son de devenir son fils. Devant le refus de celui-ci, l'envahisseur avait alors commencé une métamorphose qu'il prétendait n'avoir jamais pratiquée avant. Il avait ainsi pris l'apparence qu'il avait lors de son combat. La bataille s'était étendue dans des proportions titanesques et les deux adversaires s'étaient déplacés sur plusieurs milliers de kilomètres, faisant plusieurs victimes dans leur combat. Les amis du protecteur de la Terre avaient essayé de lui porter assistance, mais s'étaient révélés inutiles.
Le savant ingurgitait toutes ces nouvelles informations. Il se disait que décidément, il aurait dû suivre Son et les autres sur Namekk avec son robot-espion. Il voulait étudier les données qu'il venait de recueillir sur Freeza, Cold, le Super Saiyan et la mystérieuse téléportation de Gokû. Il devait donner des cellules de ces deux extraterrestres à sa principale création, son arme ultime, la créature parfaite. Cell. Il pianota sur son ordinateur et constata que celui-ci avait déjà prévu de donner des cellules des deux envahisseurs au mutant. Il était vrai qu'il avait programmé son ordinateur pour s'occuper du monstre pendant que lui-même réparait N°16, N°17 et N°18.
« Qu'est-ce que c'est, docteur Gero ? »
N°17 avait interrompu ses pensées. Il désignait l'écran où s'affichaient les données sur celui qui était conçu pour l'absorber.
« Ça ? Et bien, c'est ma véritable créature parfaite, Cell.
- Pourtant nous sommes vos plus puissantes créatures.
- Pff ! Vous ? Je vous l'ai dit, N°17, vous n'êtes que des outils. »
Gero se garda bien de préciser que Cell ne serait complet qu'une fois qu'il aurait absorbé les deux cyborgs. Ceux-ci, bien que n'ayant pas le moindre soupçon à ce sujet, étaient intrigués par cette insistance à les traiter comme de simples outils, alors qu'ils étaient ses "oeuvres" les plus puissantes.
« Mais il n'est qu'à l'état de projet, non ? » s'enquit N°18.
« Non, il est au sous-sol avec N°16. Il n'est encore qu'à l'état larvaire, mais il sera doté d'une puissance incommensurable.
- Plus que nous ? » demanda ironiquement l'ancien délinquant, incrédule.
« Absolument ! Vous n'aurez rien à voir avec lui ! Vous n'êtes que des boîtes de conserves comparés à ce qu'il sera ! Ce n'est qu'à travers lui que j'obtiendrai ma vengeance !
- Dans ce cas, poursuivit la cyborg, pourquoi nous avoir kidnappés et cybernétisés ?
- Ces tas de ferraille commencent à poser beaucoup trop de questions, » pensa Gero. Il reprit à haute voix:
« Cela ne vous regarde pas ! Mêlez-vous de ce qui vous regarde ! Vous n'êtes pas là pour penser, mais pour m'obéir ! C'est clair ?
- Puis-je me permettre une dernière question, maître ? » Elle faillit se mordre la langue en prononçant ce dernier mot.
« J'ai dit non ! Je n'ai pas à répondre à vos questions idiotes ! Alors, maintenant, laissez-moi analyser les données en paix, sinon, je vous désactive. »
Cette fois-ci, les jumeaux se turent. Ils contenaient leurs envies de meurtre. Ils espéraient bien les satisfaire un jour. Le dangereux génie, de son côté, se remit à analyser toutes les nouvelles données.
Ainsi s'écoula un an. L'ancien membre du Red Ribbon le passa à essayer de mieux comprendre tout ce qu'il avait appris. Il était chaque fois plus fasciné par ce qu'il découvrait et s'était remis à espionner Gokû et ses amis. Il ne s'occupa que très peu de ses cyborgs. Initialement, il avait prévu de les réparer pour qu'ils lui obéissent. Il avait aussi pensé en profiter pour améliorer encore leur niveau, pour que sa créature parfaite, Cell, en bénéficie également. Mais l'arrivée de Cold avait chamboulé tous ses projets. Il s'était totalement replongé dans ses recherches sur les guerriers. De plus, ayant constaté que N°17 et N°18 étaient devenus obéissants, il n'avait plus jugé nécessaire de continuer leur réparation, même si cela aurait pu être utile pour améliorer encore leur puissance. Il était trop absorbé par l'analyse des différentes données pour s'inquiéter de ce qui n'était finalement qu'un perfectionnement superflu.
Les jumeaux étant tout de même trop curieux à son goût et leur comportement étant parfois étrange, il commençait à se demander s'ils lui étaient si fidèles que ça. Il leur avait donc implanté une puce à chacun, qui leur infligeaient une grande douleur lorsqu'il appuyait sur la télécommande qui était reliée à ce système. Il pouvait ainsi leur faire comprendre qu'il n'appréciait pas du tout leur curiosité. Il y avait trouvé un certain plaisir, dominer les êtres qui étaient alors certainement les plus puissants de l'univers. Mais après tout, c'était naturel, il était leur maître, leur créateur.
Il avait durant ce temps voulu vérifier s'il avait bien réparé N°16. Constatant que l'androïde était toujours aussi pacifiste, il décida finalement de le détruire. En cas d'urgence, il avait à présent N°17 et N°18 qui lui obéissaient au doigt et à l'oeil.
Ceux-ci, de leur côté, sombraient de plus en plus dans leur haine envers leur concepteur. Ils se sentaient chaque jour plus humiliés par lui. Ils n'étaient guère plus que de vulgaires instruments pour lui et il le leur faisait bien comprendre. Toutes leurs pensées étaient orientées vers cette haine. Peu à peu, ils sentaient leur passé humain disparaître, comme une illusion. Il leur semblait n'avoir jamais été que des jouets pour ce psychopathe. Ils n'avaient plus au fond d'eux que cette rancoeur pour celui qui leur avait tout pris.
Mais au bout de cette année, l'impensable se produisit. Son Gokû mourut. Il succomba à une maladie du coeur foudroyante. Il périt dans l'impuissance générale de sa famille et de ses amis. Gero avait lui aussi assisté à travers son robot-espion à la mort de celui qui avait été l'objet de sa rancune durant de longues années. Il n'en revenait pas. C'était fini. Il ne pourrait plus assouvir sa vengeance. Même Shenron ne pourrait plus le ressusciter. Non seulement il s'agissait de sa deuxième mort, mais le dragon sacré ne pouvait de toute façon pas ramener à la vie quelqu'un décédé naturellement. Gero entra dans une rage folle. Il pleurait, hurlait, renversait tout ce qui se trouvait sur les bureaux, les frappant des poings.
« Non !!! Comment cette vermine a pu mourir autrement que par mes mains !! Je ne pourrai jamais obtenir ma vengeance !! Je n'ai vécu que pour ça durant quinze ans !! »
Le reste ne ressemblait qu'à des plaintes bestiales. Il était empli d'une fureur paroxystique. Il maudissait l'univers entier de lui avoir ôté sa vengeance. Les jumeaux regardèrent, surpris, le vieillard perdre toute raison. Finalement, ils eurent un léger sourire en coin. Voir ainsi son unique but détruit, leur procura un grand plaisir. N°17 ne put contenir une phrase pleine de sarcasme.
« Peuh ! C'est de ta faute. Si tu nous avais demandé de le tuer, il y a un an... »
Quand le désespéré entendit cela, il trouva alors ce sur quoi il allait évacuer toute sa rage.
« Comment oses-tu !?! Et tu me tutoies maintenant, en plus ??! Vous allez voir, sales boîtes de conserve !! »
Il prit la télécommande qui lui permettait d'infliger les plus atroces douleurs à ses créatures. Ils auraient largement eu le temps de l'arrêter, mais ils savaient qu'ils ne pouvaient le tuer. Ils se résignèrent donc à le laisser faire. Le savant actionna donc le bouton. Les deux victimes furent prises d'une vive souffrance dans tous leur corps et s'écroulèrent. C'était exactement comme si on avait introduit une perceuse dans leurs entrailles. La douleur était extrêmement vive. À chaque fois qu'il leur infligeait cela, ils se rappelaient la douleur de leur cybernétisation et leur totale impuissance. Leur revenaient aussi à l'esprit les images qu'il leur avait montré pour tenter de les conditionner. La trahison et la mort de leur père. La mort de Soy. Ils se remémoraient aussi chacune des déceptions qu'ils avaient subies. Chaque blessure. La première mort de leurs parents. La tombent qu'ils creusèrent pour eux. La réaction froide de leur géniteurs, quand ils furent ressuscités. La dureté de leur père qui en suivit. La dépression et l'apathie de leur mère. La nuit où elle s'était saoulée, alors que son fils était à l'hôpital. Son enfoncement dans la dépression, dans l'indifférence de leur père. Puis, la mort de leur mère. La trahison de leur gang. Leur kidnapping. Les tortures subies des mains de Gero. La douleur. Le désespoir. La colère. La rage. La haine...
Le tortionnaire leur donna d'autres décharges. Ils se convulsionnaient.
« Tas de ferrailles !! Quand allez-vous comprendre que je suis votre maître !! Vous n'avez de la valeur que parce que je vous en donne ! Vous me devez tout ! Vous n'êtes rien que je ne vous demande d'être ! »
En plus des décharges, il se mit à les frapper. Ses coups étaient ridicules pour la puissance des cyborgs. Mais ils ressentaient surtout l'humiliation. Ils enrageaient, mais ne pouvaient réagir. Au bout de plusieurs chocs, le tortionnaire posa son pied sur la tête de N°18.
« Alors ? Qui est le maître ? »
Comme il n'y avait pas de réponse, il recommença à appuyer sur le bouton.
« Qui est le maître !?! »
Ils ne criaient pas. Ils refusaient de crier, de lui donner ce plaisir. Mais N°17, sur qui son concepteur avait cette fois posé son pied, dit tout de même.
« V... Vous... Docteur Gero...
- Bien ! C'est parfait ! Et toi, N°18 ? Tu ne dis rien ?
- Vous... êtes notre maître...
- Et vous ne me présentez pas d'excuses... ? »
Les jumeaux serrèrent les dents, mais finir par lui donner satisfaction.
« Je vous déconseille de recommencer à vous moquer de moi. »
Il posa alors sa télécommande et tapa une dernière fois sur un bureau.
« Merde ! »
Les cyborgs se relevèrent douloureusement et l'observèrent se retirer dans sa chambre, dont l'entrée se trouvait au fond de la grotte. Cette fois-ci ce fut à leur tour d'évacuer leur colère. Ils frappèrent tous deux du pied et des fissures apparurent sur le sol. Cela ne les soulagea pas, mais ils ne pouvaient rien faire d'autre.
Le génie fou resta longtemps dans sa chambre, sans en sortir. Les jumeaux entendaient souvent, avec satisfaction, des sanglots et des cris de colère. Après plusieurs jours, il finit tout de même par en sortir. Il ne prononça pas une seule parole. Il avait l'air frais, pour quelqu'un qui avait passé plusieurs jours à se morfondre. Il se dirigea vers son ordinateur et commença à travailler.
« Que comptez-vous faire ? » s'enquit N°18.
« Dois-je te rappeler que je n'apprécie pas la curiosité ? »
La jeune femme se tut. Gero s'était bel et bien décidé pour un nouveau but. Puisqu'il ne pourrait plus tuer Gokû, il allait réaliser le rêve du Commandant-en-Chef Red de domination mondiale. Mais avant cela, il voulait acquérir l'immortalité. Cette envie le travaillait depuis un long moment déjà. Il allait la concrétiser. Pour y arriver, il allait se cybernétiser. Il devait donc créer un autre androïde qui pourrait l'opérer. La conception de N°19 allait commencer. Il n'avait plus les moyens de concevoir une nouvelle batterie à énergie infinie, mais cela ne lui semblait plus être nécessaire. L'objet de sa vengeance était mort et il ne ressentait plus la nécessité de créer une créature parfaite. De toute façon, Cell allait finir son développement en plusieurs années. Il lui fallait juste un androïde qui puisse vaincre les amis de Gokû, et que lui-même acquière la même force. Il étudia donc un moyen de rendre le vieux modèle de batterie à absorption d'énergie vitale plus performant et autonome.
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« Nous pouvons y aller. Nous allons attaquer Minami no Miyako comme prévu, pour attirer tous les amis de Gokû et les tuer. »
Gero devenu N°20 avait dit cela avec son sourire sardonique habituel. C'était un 12 mai, la date choisie par le savant. Le jour anniversaire de la disparition de l'armée du Red Ribbon* allait aussi devenir le jour de l'avènement du vieillard, pour effacer l'événement funeste du démantèlement de l'armée. Il avait mis deux ans, avant d'achever sa transformation. Il avait d'abord dû perfectionner le système de batterie à type absorbant et il y était parvenu. Il avait alors conçu N°19. Par la suite, il dut mettre au point un nouveau procédé de cybernétisation plus performant que celui utilisé sur les numéros de série inférieurs à neuf, mais de façon à ce qu'il ne souffre pas des mêmes désagréments que N°17 et N°18. Comme la technologie était différente et qu'il ne visait pas le même but, cela avait pu être possible. Notamment, n'ayant pas pour but d'être absorbé par Cell, le scientifique n'avait pas besoin de conserver une grande part organique, ce qui avait facilité sa transformation. Il avait alors laissé N°19 s'occuper de l'opération après l'avoir briefé. Leur puissance à lui et à son androïde était bien moindre que celle des deux numéros de série précédents. Ils étaient même en-dessous de la puissance qu'ils avaient mesurée chez Freeza, mais cela serait largement suffisant pour tuer leurs cibles. Il n'avait qu'un seul regret: Il s'était rendu compte qu'il aurait voulu tuer Gokû de ses propres mains. S'il s'était fait opéré plus tôt, avant qu'il ne devienne le Super Saiyan, cela aurait été possible. Mais on ne pouvait pas revenir dans le passé.
De leur côté, les jumeaux étaient également satisfaits. Le grand jour allait arriver. Ils allaient se débarrasser de leur bourreau. Ils avaient ruminé toute leur rancoeur ces trois dernières années. Seul ce sentiment les avait obsédés. Ils étaient emplis de cette haine que Gero leur avait transmise. Mais même s'ils en étaient consumés, ils avaient encore supporté quelques affronts pour tuer N°20 au meilleur moment. Ils avaient supporté l'affront que pour lui, il se soit donné la peine de chercher un moyen de cybernétisation sans douleur, alors qu'ils avaient subi eux-mêmes un véritable enfer. Ils avaient laissé ce minable N°19 finir son immortalisation, alors que du fait de l'opération, leur concepteur avait désactivé la puce qui reliait son coeur à leur système explosif. Ils avaient supporté le fait que ce vulgaire androïde se soit vu confier leur télécommande le temps de cette transformation. Ils voulaient le tuer au moment même où il croirait atteindre son but. Il ne lui restait plus que la télécommande comme moyen de pression sur eux.
N°19 arborait la mine d'un homme obèse avec la peau blanche comme la neige et un regard orange. Les mêmes boucle-d'oreilles que celles des anciens délinquants brillaient sur ses lobes. Un chapeau jaune et noir avec une corne au sommet et le sigle du Red Ribbon sur le front, trônait sur son crâne. Un pantalon bouffant orange à fines rayures noires verticales était retenu par une épaisse ceinture en tissu rouge. Sa chemise noire avec des épaules bouffantes était recouverte par un gilet jaune pâle aux bordures blanches et fermé par une corde rouge. De larges manchettes du même jaune enrubannaient les avant-bras et les chevilles. Des chaussures à lacets noires et blanches complétaient le tableau. Le scientifique n'avait pas changé, mais il portait les mêmes vêtements que son androïde, à l'exception d'un chapeau haut-de-forme noir sans bords et de couleurs inversées pour certains vêtements. Le gilet était noir, la chemise orange rayée de noir et le pantalon brun.
Ils s'envolèrent finalement et atterrirent dans une ville sur une île proche de Minami no Miyako en toute discrétion, dans une ruelle peu fréquentée. Ils avancèrent jusque dans une grande avenue. Les immeubles étaient majoritairement les habituels dômes blancs, plus ou moins grands, plus ou moins allongés vers le haut. Mais il y avait certaines constructions à l'ancienne et d'autres bâties sur d'épaisses tours. Du gazon entourait certaines maisons, sur lequel s'enracinaient quelques palmiers et feuillus. Des buissons étaient plantés dans de longs vases de briques. Des réverbères ponctuaient les trottoirs carrelés qui bordaient une route sur laquelle circulaient principalement des véhicules rétros avec roues, les sky-cars étant peu nombreux. L'ensemble donnait l'impression d'une ville prospère. Il faisait un temps bon, avec juste quelques cumulus.
N°20 sourit sadiquement. Une lueur dans ses yeux indiquait qu'il s'apprêtait à lancer un Eye Beam. Mais avant que cette attaque oculaire ne dévastât la ville, il sentit sa main gauche, qui tenait la télécommande, se faire arracher. Il avorta son offensive et regarda son membre, incrédule. Il se retourna et vit que N°18 tenait sa main et la télécommande. Elle écrasa le tout d'une poigne. Il regarda N°19 et constata que celui-ci avait le bras de N°17 en travers de sa tête. Le jeune homme retira son membre et l'androïde s'écroula, totalement inopérant.
« Qu... N°18... N°17... Qu'est-ce qu'il vous prend ? »
Il lui lancèrent un regard et un sourire d'une cruauté qui lui glaça le sang.
« Tu ne croyais quand même pas que nous étions réellement tes joujoux ? »
Avant même qu'il ne puisse répondre, les deux cyborgs lui arrachèrent chacun une épaule. Du fait de sa transformation qui ne lui avait laissé que peu de parties organiques, il ne ressentit aucune douleur.
« Vous me trahissez... ? Tas de... »
Ils lui mirent chacun un bras en travers du torse avant qu'il ne finît sa phrase. Ils tirèrent chacun d'un côté, le torse s'en retrouva dépecé. La jumelle rattrapa la tête avant que celle-ci ne tombât au sol. Son chapeau étant tombé, son cerveau, protégé par une bulle de verre ultra-résistant, était visible.
« Te trahir ? Pour cela, encore aurait-il fallu que nous t'ayons considéré comme notre maître. Notre seul regret est que tu ne puisses plus ressentir la douleur. »
Sur ces mots, la jeune femme écrasa entre ses mains le crâne, qui éclata. Une fois que cela fut fait, les cyborgs constatèrent qu'ils ne ressentaient rien de particulier. Rien. Ils étaient libres, mais ils se sentaient vides, sans but. Ils n'avaient plus rien. Ils avaient été transformés en machines par ce malade. Leur passé n'était plus qu'une vague illusion pleine de déceptions, de tragédies et de trahisons. Ils ne se sentaient plus humains, plus appartenir à ce monde. Ils étaient des machines sans but. Seule leur restait cette immense haine dont ils n'avaient pu se débarrasser par ce simple meurtre.
Ils ne se rendirent pas tout de suite compte de l'agitation qu'ils avaient créée, jusqu'à ce qu'ils entendissent la police arriver. Celle-ci leur ordonna de se rendre. Les concernés sourirent ironiquement, leur tournèrent le dos et se mirent à partir tranquillement, comme si de rien n'était. Les policiers les sommèrent de s'arrêter. Voyant que les deux jeunes gens n'écoutaient pas, ils firent feu. Les jumeaux ne sentirent même pas l'effet des balles. Ils se retournèrent, jetant un regard furieux aux agents. Ceux-ci, pris de panique, lâchèrent leurs armes. Pendant trois ans, le frère et la soeur avaient étouffé une immense haine en eux, après une vie de calvaire dont ils n'avaient vu le bout que pour tomber dans les mains d'un psychopathe. Ils avaient l'impression de n'avoir connu que des crapules durant toute leur vie. Même leur vieille colère envers leur père se réveilla, ainsi que celle plus diffuse qu'ils avaient ressentie contre leur mère. Par contre, ils avaient totalement rayé de leur mémoire un petit garçon qu'ils avaient sauvé, des années auparavant, et qui les admirait.
Ils continuaient de recevoir des balles, qui les chatouillaient à peine, mais leur rappelait à quel point le monde leur était hostile. Un monde qui était pourtant à présent insignifiant pour eux. Un monde qui ne pouvait plus rien contre eux. La colère bouillonnait en eux, montait. Une colère trop longtemps contenue, qui ne demandait qu'à éclater. Voir ces êtres pathétiques et méprisables, tels des insectes agaçants, crier et courir partout, les menacer de les arrêter pour ensuite leur tirer dessus alors qu’ils avaient débarrassé le monde de l’être le plus ignoble qui fut, était la goutte qui faisait déborder le vase. Ils laissèrent éclater leur colère. Ils la lâchèrent en poussant tous deux un hurlement inhumain, bestial, qui venait du plus profond de leur rage. Tous ceux qui les entouraient en eurent le sang glacé d'effroi, devant de tels hurlements. Mais l'un des spectateurs se ressaisit et visa, en criant "monstres !". Une balle, sur le front de la jeune fille. Sa tête ne recula même pas. Mais le hurlement de celle-ci cessa et alors qu'elle lança un regard empli de folie rageuse à ceux lui faisant face, son bras se leva brusquement tout seul et un kikoha en sortit. Elle réduisit en cendres les policiers qui venaient de jeter leurs armes à terre, tous tremblants. La moitié de la ville fut rasée par ce même coup. Les hurlements cessèrent, les tirs s'arrêtèrent et il n'y eut que le silence, hormis les sirènes de la police.
Les deux cyborgs se figèrent. La fille regarda sa main, avec un air ahuri. Son frère la regarda de la même façon. Ils n'avaient jamais tué. Pas une fois. Ils ne l'avaient jamais désiré. Ils avaient repoussé l'idée. Gero avait été leur première victime. Non, ce n'était pas une victime. C'étaient eux les victimes. De lui. Et du destin aussi... Il avait été tué par des machines qu'il avait créées. Un juste retour. C'était tout.
« N°18... Tu... »
N°18 porta à nouveau son regard devant elle. Devant un champ de roche et de terre, labouré, fumant, avec quelques morceaux de corps carbonisés. Et elle ne ressentait rien. Rien. Elle était une machine. Juste une machine. Une machine de mort. Elle regarda à sa gauche. Ces petites choses s'agitaient, apeurées, fuyaient. Ces choses futiles, sans valeur, si fragiles... Totalement inadéquates dans ce monde, qui écrasait tout sur son passage. Rien n'avait d'importance. Sa vie humaine n'avait jamais existé non plus. Une certaine Mâron et un certain Hazel, deux enfants jumeaux, avaient cru avoir une vie. Même une seule mésinterprétation, un seul événement mal compris, avait suffi à les jeter eux et leurs parents dans une spirale de désespoir, qui leur rappelait chaque jour leur faiblesse et leur impuissance. Pour aboutir à ça... Même en ayant compris l'erreur. Ridicule. Tout ceci était ridicule. Trop ridicule. Ce ne pouvait être qu'une illusion. Une machine. Voilà ce qu'elle était.
Un visage sans la moindre émotion, un regard vide, elle leva la main et lança négligemment un autre kikoha. Tuant d'autres petites choses. Puis un autre. Et encore un autre.
« Nu... N°18... »
Un autre. Encore un autre. Boum. Boum. Ces petites choses sautaient. Doucement, la machine se mit à rire. Rire qui s'intensifia pour devenir aussi fou que son regard ne l'était devenu.
« Ha ! Ha ! Ha ! Ha ! Ha ! »
Son frère la fixa, la voyant devenue démente. Il était éberlué... Mais aussi... Il l'enviait... Quelle insouciance que la démence. Le vide. L'oubli. Plus rien à penser. Le passé n'aurait aucune importance. N'existerait pas. La liberté. Enfin.
« Ha ! Ha ! Ha ! Ha ! Ha ! Vas-y, N°17 ! Essaie ! Essaie ! Ha ! Ha ! Ha ! Ha ! Ha ! Essaie ! »
Et il essaya. Hésitant, mais avec un petit rire nerveux, excité, il tendit la main. Et lui aussi vit ces petites choses sauter. Il sourit. Et ce sourire finit par se joindre au rire dément de sa machine jumelle.
Ils se mirent à bombarder la ville de centaines de kikoha. Ils s'amusaient. Ils se demandèrent soudain pourquoi ils avaient été si vite lassés de ce type d'attaque lors de leur première activation. Ils trouvaient à présent ces boules d'énergie fort distrayantes. Tout explosait et cela leur procurait une grande exaltation. Ces petites choses qui disparaissaient, brûlaient, sautaient. Ils s'élevèrent dans les airs et concentrèrent un gros kikoha dans leurs mains. Ils le lancèrent au sol. Eut alors lieu une puissante explosion. Si des astronautes s'étaient trouvé dans l'espace, ils auraient aperçu un point d'une luminosité aveuglante traversant les nuages. Quand la lumière diminua et que les débris retombèrent, les jumeaux purent constater qu'à la place de l'île se trouvait à présent un énorme gouffre béant dans lequel s'engouffrait l'eau de l'océan, formant ainsi une gigantesque cascade circulaire. Et ils rirent. Déments. Puis, ils se calmèrent, après de longues minutes. Prenant le froid glacial de machines.
« Hé ! Hé ! Dommage qu'on ne puisse pas lancer une attaque plus puissante sans détruire la planète... Tu crois qu'on peut survivre dans l'espace, N°17 ?
- Je ne sais pas. Mieux vaut ne pas essayer. Et si on allait à Minami no Miyako ?
- Excellente idée ! Mais ne détruisons pas tout trop vite, cette fois-ci. »
Souriant diaboliquement, les deux cyborgs s'élancèrent en volant vers la grande capitale méridionale. Laissant derrière eux le dernier endroit où ils avaient eu des émotions humaines. Le dernier endroit qui avait vu disparaître les dernières traces de ce qu'avaient été Mâron et Hazel... Seules en partirent des machines cruelles.
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*Le dictionnaire indique réellement cette coïncidence des dates! Je me demande si Toriyama l'a fait à dessein.
Ils arrivèrent au laboratoire cavernicole. Celui-ci n'avait pas changé depuis leur dernier réveil. L'entrée était fermée par une énorme porte en titane massif. De nombreux fils électriques, câbles et machines longeaient les murs laissés à l'état de roche brute. Plusieurs plans et petits appareils s'éparpillaient sur les quelques bureaux. Au centre était disposée la table d'opération sur laquelle les deux jeunes avaient été cybernétisés. Leurs deux sarcophages métalliques munis chacun d'un hublot et numérotés dix-sept et dix-huit, adossés sur un mur, reposaient à la verticale sur des socles, des gros tuyaux en sortant depuis leur sommet. Les lieux étaient incroyablement bien rangés et éclairés pour un laboratoire aménagé dans une grotte par un savant fou. N°18 demanda au scientifique pourquoi il n'avait pas voulu qu'ils tuent ses ennemis.
« Ce n'était pas encore le bon moment.
- Pourtant, nous sommes bien plus forts qu'eux et nous aurions pu les éliminer facilement. Et nous n'avons pas de défauts. Nous sommes les créatures parfaites, comme vous le souhaitiez...
- La ferme, tas de ferraille ! Vous n'avez pas à contester mes ordres ! Vous m'appartenez et me devez obéissance ! Un point c'est tout ! Vous n'êtes que des outils pour ma vengeance ! Mon arme parfaite viendra plus tard ! »
Les jumeaux continrent leur rage et se contentèrent d'acquiescer. Des outils ? Ils n'étaient que de vulgaires outils ? S'ils avaient pu le tuer en cet instant, cela n'aurait pas tardé. Il les avait humiliés, torturés, leur avait enlevé tout ce qui leur était cher pour les transformer en instruments de sa vengeance. Ils devaient garder sa confiance et obtenir des informations auprès de lui, s'ils voulaient s'échapper. Ils ne souhaitaient pas tuer ces gens. Ils ne les connaissaient pas et se fichaient d'eux. N°18 n'avait posé sa question que pour comprendre les agissements du vieillard. Ils devaient tenir.
Gero, alla vers son ordinateur pour analyser les dernières données recueillies. Il appris donc d'où venait ce Cold. Gokû et les autres avaient ainsi affronté un homme nommé Freeza sur Namekk. Il ne savait pas très bien pourquoi Son et les siens l'avaient rencontré là-bas, mais apparemment, il était sensé être le numéro un de l'univers en terme de puissance. Il sourit à ce titre, car ses cyborgs étaient bien plus forts que lui. Gokû l'avait vaincu en devenant le Super Saiyan. Gero ne put pas en savoir plus sur ce Super Saiyan de légende, mais en tout cas, c'était une transformation qui conférait une énorme puissance.
Freeza était alors revenu sur Terre pour se venger de sa défaite et il était accompagné de son père, Cold. Étrangement, à son arrivée sur Terre, celui-ci n'était pas le même que lors du combat. Il était beaucoup plus grand et avait un aspect plus bestial, que ses grandes cornes grises accentuaient. Sa peau mauve était munie de carapaces blanches et roses sur la tête, les avant-bras, les tibias et le bout de sa queue. Une cape violette recouvrait une armure recouvrant son buste. Quant à son fils, il ressemblait à son père lorsque celui-ci avait affronté Son, si ce n'était qu'il était en grande partie mécanisé, sans doute était-ce dû aux blessures infligées par le Super Saiyan sur Namekk.
Ils allaient commencer à s'attaquer à la Terre, mais Gokû s'était alors téléporté devant eux avec une technique étrange. Il avait rapidement mis l'ancien numéro un à terre, tandis que ses amis avaient tué les hommes de main. Mais Son, lui, n'avait pas achevé son adversaire et avait même laissé à l'autre ennemi le choix de partir, s'ils ne voulaient pas mourir. Gero grogna à cette scène. Épargner ce maudit extraterrestre alors qu'il avait froidement assassiné le Commandant-en-Chef Red, quatorze ans plus tôt. Le savant enrageait. Cependant Cold avait lui-même achevé son fils en disant que celui-ci ne lui était plus utile. Apparemment, il s'était servi de lui pour ne pas avoir à faire "le sale travail". Il semblait ne pas aimer l'effort. Il avait ensuite proposé à Son de devenir son fils. Devant le refus de celui-ci, l'envahisseur avait alors commencé une métamorphose qu'il prétendait n'avoir jamais pratiquée avant. Il avait ainsi pris l'apparence qu'il avait lors de son combat. La bataille s'était étendue dans des proportions titanesques et les deux adversaires s'étaient déplacés sur plusieurs milliers de kilomètres, faisant plusieurs victimes dans leur combat. Les amis du protecteur de la Terre avaient essayé de lui porter assistance, mais s'étaient révélés inutiles.
Le savant ingurgitait toutes ces nouvelles informations. Il se disait que décidément, il aurait dû suivre Son et les autres sur Namekk avec son robot-espion. Il voulait étudier les données qu'il venait de recueillir sur Freeza, Cold, le Super Saiyan et la mystérieuse téléportation de Gokû. Il devait donner des cellules de ces deux extraterrestres à sa principale création, son arme ultime, la créature parfaite. Cell. Il pianota sur son ordinateur et constata que celui-ci avait déjà prévu de donner des cellules des deux envahisseurs au mutant. Il était vrai qu'il avait programmé son ordinateur pour s'occuper du monstre pendant que lui-même réparait N°16, N°17 et N°18.
« Qu'est-ce que c'est, docteur Gero ? »
N°17 avait interrompu ses pensées. Il désignait l'écran où s'affichaient les données sur celui qui était conçu pour l'absorber.
« Ça ? Et bien, c'est ma véritable créature parfaite, Cell.
- Pourtant nous sommes vos plus puissantes créatures.
- Pff ! Vous ? Je vous l'ai dit, N°17, vous n'êtes que des outils. »
Gero se garda bien de préciser que Cell ne serait complet qu'une fois qu'il aurait absorbé les deux cyborgs. Ceux-ci, bien que n'ayant pas le moindre soupçon à ce sujet, étaient intrigués par cette insistance à les traiter comme de simples outils, alors qu'ils étaient ses "oeuvres" les plus puissantes.
« Mais il n'est qu'à l'état de projet, non ? » s'enquit N°18.
« Non, il est au sous-sol avec N°16. Il n'est encore qu'à l'état larvaire, mais il sera doté d'une puissance incommensurable.
- Plus que nous ? » demanda ironiquement l'ancien délinquant, incrédule.
« Absolument ! Vous n'aurez rien à voir avec lui ! Vous n'êtes que des boîtes de conserves comparés à ce qu'il sera ! Ce n'est qu'à travers lui que j'obtiendrai ma vengeance !
- Dans ce cas, poursuivit la cyborg, pourquoi nous avoir kidnappés et cybernétisés ?
- Ces tas de ferraille commencent à poser beaucoup trop de questions, » pensa Gero. Il reprit à haute voix:
« Cela ne vous regarde pas ! Mêlez-vous de ce qui vous regarde ! Vous n'êtes pas là pour penser, mais pour m'obéir ! C'est clair ?
- Puis-je me permettre une dernière question, maître ? » Elle faillit se mordre la langue en prononçant ce dernier mot.
« J'ai dit non ! Je n'ai pas à répondre à vos questions idiotes ! Alors, maintenant, laissez-moi analyser les données en paix, sinon, je vous désactive. »
Cette fois-ci, les jumeaux se turent. Ils contenaient leurs envies de meurtre. Ils espéraient bien les satisfaire un jour. Le dangereux génie, de son côté, se remit à analyser toutes les nouvelles données.
Ainsi s'écoula un an. L'ancien membre du Red Ribbon le passa à essayer de mieux comprendre tout ce qu'il avait appris. Il était chaque fois plus fasciné par ce qu'il découvrait et s'était remis à espionner Gokû et ses amis. Il ne s'occupa que très peu de ses cyborgs. Initialement, il avait prévu de les réparer pour qu'ils lui obéissent. Il avait aussi pensé en profiter pour améliorer encore leur niveau, pour que sa créature parfaite, Cell, en bénéficie également. Mais l'arrivée de Cold avait chamboulé tous ses projets. Il s'était totalement replongé dans ses recherches sur les guerriers. De plus, ayant constaté que N°17 et N°18 étaient devenus obéissants, il n'avait plus jugé nécessaire de continuer leur réparation, même si cela aurait pu être utile pour améliorer encore leur puissance. Il était trop absorbé par l'analyse des différentes données pour s'inquiéter de ce qui n'était finalement qu'un perfectionnement superflu.
Les jumeaux étant tout de même trop curieux à son goût et leur comportement étant parfois étrange, il commençait à se demander s'ils lui étaient si fidèles que ça. Il leur avait donc implanté une puce à chacun, qui leur infligeaient une grande douleur lorsqu'il appuyait sur la télécommande qui était reliée à ce système. Il pouvait ainsi leur faire comprendre qu'il n'appréciait pas du tout leur curiosité. Il y avait trouvé un certain plaisir, dominer les êtres qui étaient alors certainement les plus puissants de l'univers. Mais après tout, c'était naturel, il était leur maître, leur créateur.
Il avait durant ce temps voulu vérifier s'il avait bien réparé N°16. Constatant que l'androïde était toujours aussi pacifiste, il décida finalement de le détruire. En cas d'urgence, il avait à présent N°17 et N°18 qui lui obéissaient au doigt et à l'oeil.
Ceux-ci, de leur côté, sombraient de plus en plus dans leur haine envers leur concepteur. Ils se sentaient chaque jour plus humiliés par lui. Ils n'étaient guère plus que de vulgaires instruments pour lui et il le leur faisait bien comprendre. Toutes leurs pensées étaient orientées vers cette haine. Peu à peu, ils sentaient leur passé humain disparaître, comme une illusion. Il leur semblait n'avoir jamais été que des jouets pour ce psychopathe. Ils n'avaient plus au fond d'eux que cette rancoeur pour celui qui leur avait tout pris.
Mais au bout de cette année, l'impensable se produisit. Son Gokû mourut. Il succomba à une maladie du coeur foudroyante. Il périt dans l'impuissance générale de sa famille et de ses amis. Gero avait lui aussi assisté à travers son robot-espion à la mort de celui qui avait été l'objet de sa rancune durant de longues années. Il n'en revenait pas. C'était fini. Il ne pourrait plus assouvir sa vengeance. Même Shenron ne pourrait plus le ressusciter. Non seulement il s'agissait de sa deuxième mort, mais le dragon sacré ne pouvait de toute façon pas ramener à la vie quelqu'un décédé naturellement. Gero entra dans une rage folle. Il pleurait, hurlait, renversait tout ce qui se trouvait sur les bureaux, les frappant des poings.
« Non !!! Comment cette vermine a pu mourir autrement que par mes mains !! Je ne pourrai jamais obtenir ma vengeance !! Je n'ai vécu que pour ça durant quinze ans !! »
Le reste ne ressemblait qu'à des plaintes bestiales. Il était empli d'une fureur paroxystique. Il maudissait l'univers entier de lui avoir ôté sa vengeance. Les jumeaux regardèrent, surpris, le vieillard perdre toute raison. Finalement, ils eurent un léger sourire en coin. Voir ainsi son unique but détruit, leur procura un grand plaisir. N°17 ne put contenir une phrase pleine de sarcasme.
« Peuh ! C'est de ta faute. Si tu nous avais demandé de le tuer, il y a un an... »
Quand le désespéré entendit cela, il trouva alors ce sur quoi il allait évacuer toute sa rage.
« Comment oses-tu !?! Et tu me tutoies maintenant, en plus ??! Vous allez voir, sales boîtes de conserve !! »
Il prit la télécommande qui lui permettait d'infliger les plus atroces douleurs à ses créatures. Ils auraient largement eu le temps de l'arrêter, mais ils savaient qu'ils ne pouvaient le tuer. Ils se résignèrent donc à le laisser faire. Le savant actionna donc le bouton. Les deux victimes furent prises d'une vive souffrance dans tous leur corps et s'écroulèrent. C'était exactement comme si on avait introduit une perceuse dans leurs entrailles. La douleur était extrêmement vive. À chaque fois qu'il leur infligeait cela, ils se rappelaient la douleur de leur cybernétisation et leur totale impuissance. Leur revenaient aussi à l'esprit les images qu'il leur avait montré pour tenter de les conditionner. La trahison et la mort de leur père. La mort de Soy. Ils se remémoraient aussi chacune des déceptions qu'ils avaient subies. Chaque blessure. La première mort de leurs parents. La tombent qu'ils creusèrent pour eux. La réaction froide de leur géniteurs, quand ils furent ressuscités. La dureté de leur père qui en suivit. La dépression et l'apathie de leur mère. La nuit où elle s'était saoulée, alors que son fils était à l'hôpital. Son enfoncement dans la dépression, dans l'indifférence de leur père. Puis, la mort de leur mère. La trahison de leur gang. Leur kidnapping. Les tortures subies des mains de Gero. La douleur. Le désespoir. La colère. La rage. La haine...
Le tortionnaire leur donna d'autres décharges. Ils se convulsionnaient.
« Tas de ferrailles !! Quand allez-vous comprendre que je suis votre maître !! Vous n'avez de la valeur que parce que je vous en donne ! Vous me devez tout ! Vous n'êtes rien que je ne vous demande d'être ! »
En plus des décharges, il se mit à les frapper. Ses coups étaient ridicules pour la puissance des cyborgs. Mais ils ressentaient surtout l'humiliation. Ils enrageaient, mais ne pouvaient réagir. Au bout de plusieurs chocs, le tortionnaire posa son pied sur la tête de N°18.
« Alors ? Qui est le maître ? »
Comme il n'y avait pas de réponse, il recommença à appuyer sur le bouton.
« Qui est le maître !?! »
Ils ne criaient pas. Ils refusaient de crier, de lui donner ce plaisir. Mais N°17, sur qui son concepteur avait cette fois posé son pied, dit tout de même.
« V... Vous... Docteur Gero...
- Bien ! C'est parfait ! Et toi, N°18 ? Tu ne dis rien ?
- Vous... êtes notre maître...
- Et vous ne me présentez pas d'excuses... ? »
Les jumeaux serrèrent les dents, mais finir par lui donner satisfaction.
« Je vous déconseille de recommencer à vous moquer de moi. »
Il posa alors sa télécommande et tapa une dernière fois sur un bureau.
« Merde ! »
Les cyborgs se relevèrent douloureusement et l'observèrent se retirer dans sa chambre, dont l'entrée se trouvait au fond de la grotte. Cette fois-ci ce fut à leur tour d'évacuer leur colère. Ils frappèrent tous deux du pied et des fissures apparurent sur le sol. Cela ne les soulagea pas, mais ils ne pouvaient rien faire d'autre.
Le génie fou resta longtemps dans sa chambre, sans en sortir. Les jumeaux entendaient souvent, avec satisfaction, des sanglots et des cris de colère. Après plusieurs jours, il finit tout de même par en sortir. Il ne prononça pas une seule parole. Il avait l'air frais, pour quelqu'un qui avait passé plusieurs jours à se morfondre. Il se dirigea vers son ordinateur et commença à travailler.
« Que comptez-vous faire ? » s'enquit N°18.
« Dois-je te rappeler que je n'apprécie pas la curiosité ? »
La jeune femme se tut. Gero s'était bel et bien décidé pour un nouveau but. Puisqu'il ne pourrait plus tuer Gokû, il allait réaliser le rêve du Commandant-en-Chef Red de domination mondiale. Mais avant cela, il voulait acquérir l'immortalité. Cette envie le travaillait depuis un long moment déjà. Il allait la concrétiser. Pour y arriver, il allait se cybernétiser. Il devait donc créer un autre androïde qui pourrait l'opérer. La conception de N°19 allait commencer. Il n'avait plus les moyens de concevoir une nouvelle batterie à énergie infinie, mais cela ne lui semblait plus être nécessaire. L'objet de sa vengeance était mort et il ne ressentait plus la nécessité de créer une créature parfaite. De toute façon, Cell allait finir son développement en plusieurs années. Il lui fallait juste un androïde qui puisse vaincre les amis de Gokû, et que lui-même acquière la même force. Il étudia donc un moyen de rendre le vieux modèle de batterie à absorption d'énergie vitale plus performant et autonome.
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« Nous pouvons y aller. Nous allons attaquer Minami no Miyako comme prévu, pour attirer tous les amis de Gokû et les tuer. »
Gero devenu N°20 avait dit cela avec son sourire sardonique habituel. C'était un 12 mai, la date choisie par le savant. Le jour anniversaire de la disparition de l'armée du Red Ribbon* allait aussi devenir le jour de l'avènement du vieillard, pour effacer l'événement funeste du démantèlement de l'armée. Il avait mis deux ans, avant d'achever sa transformation. Il avait d'abord dû perfectionner le système de batterie à type absorbant et il y était parvenu. Il avait alors conçu N°19. Par la suite, il dut mettre au point un nouveau procédé de cybernétisation plus performant que celui utilisé sur les numéros de série inférieurs à neuf, mais de façon à ce qu'il ne souffre pas des mêmes désagréments que N°17 et N°18. Comme la technologie était différente et qu'il ne visait pas le même but, cela avait pu être possible. Notamment, n'ayant pas pour but d'être absorbé par Cell, le scientifique n'avait pas besoin de conserver une grande part organique, ce qui avait facilité sa transformation. Il avait alors laissé N°19 s'occuper de l'opération après l'avoir briefé. Leur puissance à lui et à son androïde était bien moindre que celle des deux numéros de série précédents. Ils étaient même en-dessous de la puissance qu'ils avaient mesurée chez Freeza, mais cela serait largement suffisant pour tuer leurs cibles. Il n'avait qu'un seul regret: Il s'était rendu compte qu'il aurait voulu tuer Gokû de ses propres mains. S'il s'était fait opéré plus tôt, avant qu'il ne devienne le Super Saiyan, cela aurait été possible. Mais on ne pouvait pas revenir dans le passé.
De leur côté, les jumeaux étaient également satisfaits. Le grand jour allait arriver. Ils allaient se débarrasser de leur bourreau. Ils avaient ruminé toute leur rancoeur ces trois dernières années. Seul ce sentiment les avait obsédés. Ils étaient emplis de cette haine que Gero leur avait transmise. Mais même s'ils en étaient consumés, ils avaient encore supporté quelques affronts pour tuer N°20 au meilleur moment. Ils avaient supporté l'affront que pour lui, il se soit donné la peine de chercher un moyen de cybernétisation sans douleur, alors qu'ils avaient subi eux-mêmes un véritable enfer. Ils avaient laissé ce minable N°19 finir son immortalisation, alors que du fait de l'opération, leur concepteur avait désactivé la puce qui reliait son coeur à leur système explosif. Ils avaient supporté le fait que ce vulgaire androïde se soit vu confier leur télécommande le temps de cette transformation. Ils voulaient le tuer au moment même où il croirait atteindre son but. Il ne lui restait plus que la télécommande comme moyen de pression sur eux.
N°19 arborait la mine d'un homme obèse avec la peau blanche comme la neige et un regard orange. Les mêmes boucle-d'oreilles que celles des anciens délinquants brillaient sur ses lobes. Un chapeau jaune et noir avec une corne au sommet et le sigle du Red Ribbon sur le front, trônait sur son crâne. Un pantalon bouffant orange à fines rayures noires verticales était retenu par une épaisse ceinture en tissu rouge. Sa chemise noire avec des épaules bouffantes était recouverte par un gilet jaune pâle aux bordures blanches et fermé par une corde rouge. De larges manchettes du même jaune enrubannaient les avant-bras et les chevilles. Des chaussures à lacets noires et blanches complétaient le tableau. Le scientifique n'avait pas changé, mais il portait les mêmes vêtements que son androïde, à l'exception d'un chapeau haut-de-forme noir sans bords et de couleurs inversées pour certains vêtements. Le gilet était noir, la chemise orange rayée de noir et le pantalon brun.
Ils s'envolèrent finalement et atterrirent dans une ville sur une île proche de Minami no Miyako en toute discrétion, dans une ruelle peu fréquentée. Ils avancèrent jusque dans une grande avenue. Les immeubles étaient majoritairement les habituels dômes blancs, plus ou moins grands, plus ou moins allongés vers le haut. Mais il y avait certaines constructions à l'ancienne et d'autres bâties sur d'épaisses tours. Du gazon entourait certaines maisons, sur lequel s'enracinaient quelques palmiers et feuillus. Des buissons étaient plantés dans de longs vases de briques. Des réverbères ponctuaient les trottoirs carrelés qui bordaient une route sur laquelle circulaient principalement des véhicules rétros avec roues, les sky-cars étant peu nombreux. L'ensemble donnait l'impression d'une ville prospère. Il faisait un temps bon, avec juste quelques cumulus.
N°20 sourit sadiquement. Une lueur dans ses yeux indiquait qu'il s'apprêtait à lancer un Eye Beam. Mais avant que cette attaque oculaire ne dévastât la ville, il sentit sa main gauche, qui tenait la télécommande, se faire arracher. Il avorta son offensive et regarda son membre, incrédule. Il se retourna et vit que N°18 tenait sa main et la télécommande. Elle écrasa le tout d'une poigne. Il regarda N°19 et constata que celui-ci avait le bras de N°17 en travers de sa tête. Le jeune homme retira son membre et l'androïde s'écroula, totalement inopérant.
« Qu... N°18... N°17... Qu'est-ce qu'il vous prend ? »
Il lui lancèrent un regard et un sourire d'une cruauté qui lui glaça le sang.
« Tu ne croyais quand même pas que nous étions réellement tes joujoux ? »
Avant même qu'il ne puisse répondre, les deux cyborgs lui arrachèrent chacun une épaule. Du fait de sa transformation qui ne lui avait laissé que peu de parties organiques, il ne ressentit aucune douleur.
« Vous me trahissez... ? Tas de... »
Ils lui mirent chacun un bras en travers du torse avant qu'il ne finît sa phrase. Ils tirèrent chacun d'un côté, le torse s'en retrouva dépecé. La jumelle rattrapa la tête avant que celle-ci ne tombât au sol. Son chapeau étant tombé, son cerveau, protégé par une bulle de verre ultra-résistant, était visible.
« Te trahir ? Pour cela, encore aurait-il fallu que nous t'ayons considéré comme notre maître. Notre seul regret est que tu ne puisses plus ressentir la douleur. »
Sur ces mots, la jeune femme écrasa entre ses mains le crâne, qui éclata. Une fois que cela fut fait, les cyborgs constatèrent qu'ils ne ressentaient rien de particulier. Rien. Ils étaient libres, mais ils se sentaient vides, sans but. Ils n'avaient plus rien. Ils avaient été transformés en machines par ce malade. Leur passé n'était plus qu'une vague illusion pleine de déceptions, de tragédies et de trahisons. Ils ne se sentaient plus humains, plus appartenir à ce monde. Ils étaient des machines sans but. Seule leur restait cette immense haine dont ils n'avaient pu se débarrasser par ce simple meurtre.
Ils ne se rendirent pas tout de suite compte de l'agitation qu'ils avaient créée, jusqu'à ce qu'ils entendissent la police arriver. Celle-ci leur ordonna de se rendre. Les concernés sourirent ironiquement, leur tournèrent le dos et se mirent à partir tranquillement, comme si de rien n'était. Les policiers les sommèrent de s'arrêter. Voyant que les deux jeunes gens n'écoutaient pas, ils firent feu. Les jumeaux ne sentirent même pas l'effet des balles. Ils se retournèrent, jetant un regard furieux aux agents. Ceux-ci, pris de panique, lâchèrent leurs armes. Pendant trois ans, le frère et la soeur avaient étouffé une immense haine en eux, après une vie de calvaire dont ils n'avaient vu le bout que pour tomber dans les mains d'un psychopathe. Ils avaient l'impression de n'avoir connu que des crapules durant toute leur vie. Même leur vieille colère envers leur père se réveilla, ainsi que celle plus diffuse qu'ils avaient ressentie contre leur mère. Par contre, ils avaient totalement rayé de leur mémoire un petit garçon qu'ils avaient sauvé, des années auparavant, et qui les admirait.
Ils continuaient de recevoir des balles, qui les chatouillaient à peine, mais leur rappelait à quel point le monde leur était hostile. Un monde qui était pourtant à présent insignifiant pour eux. Un monde qui ne pouvait plus rien contre eux. La colère bouillonnait en eux, montait. Une colère trop longtemps contenue, qui ne demandait qu'à éclater. Voir ces êtres pathétiques et méprisables, tels des insectes agaçants, crier et courir partout, les menacer de les arrêter pour ensuite leur tirer dessus alors qu’ils avaient débarrassé le monde de l’être le plus ignoble qui fut, était la goutte qui faisait déborder le vase. Ils laissèrent éclater leur colère. Ils la lâchèrent en poussant tous deux un hurlement inhumain, bestial, qui venait du plus profond de leur rage. Tous ceux qui les entouraient en eurent le sang glacé d'effroi, devant de tels hurlements. Mais l'un des spectateurs se ressaisit et visa, en criant "monstres !". Une balle, sur le front de la jeune fille. Sa tête ne recula même pas. Mais le hurlement de celle-ci cessa et alors qu'elle lança un regard empli de folie rageuse à ceux lui faisant face, son bras se leva brusquement tout seul et un kikoha en sortit. Elle réduisit en cendres les policiers qui venaient de jeter leurs armes à terre, tous tremblants. La moitié de la ville fut rasée par ce même coup. Les hurlements cessèrent, les tirs s'arrêtèrent et il n'y eut que le silence, hormis les sirènes de la police.
Les deux cyborgs se figèrent. La fille regarda sa main, avec un air ahuri. Son frère la regarda de la même façon. Ils n'avaient jamais tué. Pas une fois. Ils ne l'avaient jamais désiré. Ils avaient repoussé l'idée. Gero avait été leur première victime. Non, ce n'était pas une victime. C'étaient eux les victimes. De lui. Et du destin aussi... Il avait été tué par des machines qu'il avait créées. Un juste retour. C'était tout.
« N°18... Tu... »
N°18 porta à nouveau son regard devant elle. Devant un champ de roche et de terre, labouré, fumant, avec quelques morceaux de corps carbonisés. Et elle ne ressentait rien. Rien. Elle était une machine. Juste une machine. Une machine de mort. Elle regarda à sa gauche. Ces petites choses s'agitaient, apeurées, fuyaient. Ces choses futiles, sans valeur, si fragiles... Totalement inadéquates dans ce monde, qui écrasait tout sur son passage. Rien n'avait d'importance. Sa vie humaine n'avait jamais existé non plus. Une certaine Mâron et un certain Hazel, deux enfants jumeaux, avaient cru avoir une vie. Même une seule mésinterprétation, un seul événement mal compris, avait suffi à les jeter eux et leurs parents dans une spirale de désespoir, qui leur rappelait chaque jour leur faiblesse et leur impuissance. Pour aboutir à ça... Même en ayant compris l'erreur. Ridicule. Tout ceci était ridicule. Trop ridicule. Ce ne pouvait être qu'une illusion. Une machine. Voilà ce qu'elle était.
Un visage sans la moindre émotion, un regard vide, elle leva la main et lança négligemment un autre kikoha. Tuant d'autres petites choses. Puis un autre. Et encore un autre.
« Nu... N°18... »
Un autre. Encore un autre. Boum. Boum. Ces petites choses sautaient. Doucement, la machine se mit à rire. Rire qui s'intensifia pour devenir aussi fou que son regard ne l'était devenu.
« Ha ! Ha ! Ha ! Ha ! Ha ! »
Son frère la fixa, la voyant devenue démente. Il était éberlué... Mais aussi... Il l'enviait... Quelle insouciance que la démence. Le vide. L'oubli. Plus rien à penser. Le passé n'aurait aucune importance. N'existerait pas. La liberté. Enfin.
« Ha ! Ha ! Ha ! Ha ! Ha ! Vas-y, N°17 ! Essaie ! Essaie ! Ha ! Ha ! Ha ! Ha ! Ha ! Essaie ! »
Et il essaya. Hésitant, mais avec un petit rire nerveux, excité, il tendit la main. Et lui aussi vit ces petites choses sauter. Il sourit. Et ce sourire finit par se joindre au rire dément de sa machine jumelle.
Ils se mirent à bombarder la ville de centaines de kikoha. Ils s'amusaient. Ils se demandèrent soudain pourquoi ils avaient été si vite lassés de ce type d'attaque lors de leur première activation. Ils trouvaient à présent ces boules d'énergie fort distrayantes. Tout explosait et cela leur procurait une grande exaltation. Ces petites choses qui disparaissaient, brûlaient, sautaient. Ils s'élevèrent dans les airs et concentrèrent un gros kikoha dans leurs mains. Ils le lancèrent au sol. Eut alors lieu une puissante explosion. Si des astronautes s'étaient trouvé dans l'espace, ils auraient aperçu un point d'une luminosité aveuglante traversant les nuages. Quand la lumière diminua et que les débris retombèrent, les jumeaux purent constater qu'à la place de l'île se trouvait à présent un énorme gouffre béant dans lequel s'engouffrait l'eau de l'océan, formant ainsi une gigantesque cascade circulaire. Et ils rirent. Déments. Puis, ils se calmèrent, après de longues minutes. Prenant le froid glacial de machines.
« Hé ! Hé ! Dommage qu'on ne puisse pas lancer une attaque plus puissante sans détruire la planète... Tu crois qu'on peut survivre dans l'espace, N°17 ?
- Je ne sais pas. Mieux vaut ne pas essayer. Et si on allait à Minami no Miyako ?
- Excellente idée ! Mais ne détruisons pas tout trop vite, cette fois-ci. »
Souriant diaboliquement, les deux cyborgs s'élancèrent en volant vers la grande capitale méridionale. Laissant derrière eux le dernier endroit où ils avaient eu des émotions humaines. Le dernier endroit qui avait vu disparaître les dernières traces de ce qu'avaient été Mâron et Hazel... Seules en partirent des machines cruelles.
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*Le dictionnaire indique réellement cette coïncidence des dates! Je me demande si Toriyama l'a fait à dessein.